Ce matin, 3 permanents de l’équipe nationale sont allés à la rencontre des professionnel·les de la coopérative sociale Europe Consulting qui porte avec des partenaires (notamment Caritas), des lieux d’accueil pour des personnes sans abri et sans domicile. C’est au Pôle social de Termini que nous sommes attendus. Le bâtiment qui nous accueille se situe à côté de la Gare de Termini. Ce bâtiment est d’ailleurs mis à disposition gracieusement par la Gare. C’est donc bien pour cela que la structure d’accueil se dénomme « Binario » comme quai de la Gare.
Gianni (qui sera par ailleurs le traducteur de notre échange, car il parle parfaitement le français), Fabrizio (Vice-président de la coopérative et responsable du pôle social), Simone et Fulia (intervenant·es sociaux·ales) nous accueillent très chaleureusement autour d’un café. S’en suivront 3 heures de présentation et de discussion passionnantes !
Ce pôle social est constitué de 4 espaces complémentaires : une douche-laverie, un accueil de nuit à bas seuil d’exigence, un accueil de jour et enfin un « guichet » unique d’accueil et d’orientation.
C’est là que sont accueillies des personnes en situation de très grandes fragilités, sociales, sanitaires et psychiques, par une quarantaine de professionnel·les et une trentaine de bénévoles qui viennent en renfort (animation d’activités, etc.).
L’activité est riche et variée, il serait complexe de vouloir la résumer en quelque lignes de blog. Mais les échanges ont montré que le projet politique de la structure est fort avec notamment comme socle la volonté d’accueillir la personne, pour qu’elle puisse se poser, sans être assignée à une étiquette. La complexité de la personne est prise en compte tout comme ses capacités et ses compétences. Il s’agit ici de ne pas assigner, mais de favoriser la rencontre avec les autres (hôtes comme sont dénommées les personnes accueillies, bénévoles, professionnel·les). Le collectif est un axe important, pour développer le projet (mise en œuvre de groupe de parole, groupe d’activité, etc.).
Pour soutenir ce travail l’accompagnement et le soutien des professionnel·les et des bénévoles sont fondamentales. Il est nécessaire pour chacun·e d’avoir des lieux pour déposer, nourrir sa réflexion, construire son action à partir d’un travail clinique partagé et régulier. C’est donc bien dans cette dynamique, que la coopérative porte des expérimentations, comme les groupes de parole et d’analyse pour les pros, mais aussi un centre clinique de proximité, dans lequel les regards et les analyses de tous les intervenant·es sont les bienvenues, pour comprendre, analyser avec l’aide du psychiatre de la structure.
D’ailleurs si nous faisons un petit tour du côté de la psychiatrie et de la santé mentale, l’échange entre-nous a été là aussi très riche. Si l’Italie appuie son action sur la loi de Basaglia (du nom d’un psychiatre italien de Trieste) qui a permis de refonder la psychiatrie en abolissant notamment les hôpitaux psychiatriques (loi 180), le constat fait par les professionnel·les et que cette loi n’a pas été jusqu’au bout de la logique et que l’accueil des fous dans la citée n’a pas été totalement pensé. Il y a des manques et des « trous dans la raquette ». C’est pour cela que l’équipe de Binario 95, soutenu par un travail collectif avec SMES europe et SMES italie (Santé mentale et exclusion sociale), tente de construire des ponts entre les professionnel·les, pour que la question de la santé mentale soit partagée et ne reste pas l’affaire des psychiatres uniquement. Il s’agit ainsi de travailler sur la compréhension plus fine des problématiques des personnes sans abris : mieux comprendre pour mieux accueillir et accompagner. Penser l’accueil de l’autre pour qu’il ne soit pas sous domination des profesionnel·les, mais qu’il·elle puisse avoir son libre arbitre (reprendre sa liberté de penser, de dire, d’analyse, d’agir et de faire), telles sont les lignes de force du projet politique de Binario 95, que Gianni qualifie de « petit village des solidarités ».
David Ryboloviecz
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