Patrizia Sentinelli et Francesca Pisano sont membres de l’association amie des Ceméa, Altramente « Scuela per tutti »

Cette association mène des activités gratuites avec les décrocheurs scolaires, d’accompagnement à la scolarité (français, histoire, mathématiques…), de même que des cours d’alphabétisation, notamment des femmes en matinée avec un service de garde d’enfants ; il y a aussi un atelier de lecture et les activités peuvent donner lieu à des manifestations ou des expositions. L’association occupe les locaux de l’école. Les activités sont prises en charge complètement par les bénévoles, volontaires de l’association, des lycéens en stage (apprentis) et des stagiaires. Les personnes accueillies sont issues du quartier, et sont d’origine étrangère (bengalaise en forte majorité, egyptiennes, afgannes… ). L’association fait aussi un travail de plaidoyer.

Depuis 5 ans, la fête de la lecture, sorte de festival, donne lieu à un travail avec toutes les écoles du quartier. A côté du travail à l’école, il existe aussi un travail d’orientation pour les familles. L’association partage avec les Ceméa l’idée de proposer des moments de rencontre avec des italiens et des personnes d’origine étrangères pour favoriser une mixité de relation.

Patrizzia est la fondatrice de l’association et elle est donc présidente actuellement à la retraite ; elle a été enseignante longtemps et a fait aussi de la politique, à plusieurs niveaux. Elle est ici depuis 10 ans, et se dit militante de ce projet. Francesca est étudiante, bénévole ici l’année dernière et cette année en service civique. Tina, est professeure de lettre. Et une stagiaire est là en apprentissage (Lycéenne). Le travail intergénérationnel est un principe défendu par l’association. Francesco est le vice-président. C’est le premier homme rencontré depuis notre arrivée. Ce qui amène la question où sont les hommes ? Les hommes ne sont pas dans les activités sociales. Et génériquement on observe que dans la réalité la situation n’est pas paritaire : 10 femmes sur 40 au gouvernement Italien.

Comment alors s’articule le combat politique et le travail du terrain vécu ici. Patrizzia a exercé des fonctions de Ministre des affaires extérieures, pour la coopération en Afrique, même si c’est du passé, elle nous répond : 

La politique en Italie est un désastre. Il y a une fracture entre les 2 sphères citoyennes et élus politique. Pour autant, c’est très important les rapports entre les 2, chaque fois on tente de réduire l’écart. Mais il y a une distance, notamment dans cette période, entre la politique et les besoins sociaux ; elle s’est convaincue que d’être de l’autre côté de la barrière pouvait être utile et ainsi elle s’est engagée dans l’activisme de l’association ; faire de la politique européenne notamment, est très complexe et elle a dit « ciao ». Pour autant elle pense que c’est nécessaire les partis, et qu’il faut aider à retisser des liens. « Comme asso nous avons l’objectif de faire réseau avec d’autres, de produire des choses qui peuvent être diffusés, à partir du travail sur le terrain. Le travail social c’est très utile mais aussi très dispersé ; C’est pourquoi les liens avec la politique sont importants. Le réseau c’est ça « scuala migranti », dont les Ceméa mezzogiono, ainsi que la Fédération italienne des Ceméa. Et c’est la même chose pour les autres associations. Le travail concret constitue une production de communication, un positionnement politique, avec des appels par exemple faits aux enseignants qui ont pu leur être adressés. Les associations sont là pour régler les problèmes immédiats, en responsabilité, dans une situation où l’école, les institutions sont plus éloignées des problématiques très locales, sociales. »

Francesca qui est plus jeune, complète le propos à notre demande : « Moi je suis désillusionnée par la politique surtout dans cette dernière année. Avec l’engagement dans le quartier et par l’action, je pense qu’il y a de petit engagement qui peuvent changer les choses maintenant ; parce que la situation politique est terrible. »

Aux Ceméa Mezzogiorno les jeunes témoignent aussi de ça : c’est par les actions concrètes sur le terrain avec des petits groupes qui ont des effets immédiat que les militants se sentent utiles : c’est le seul retour positif que les jeunes ont sur la politique de l’engagement ; ils sont porteurs de l’idée qu’il ne faut pas être une grande masse pour faire des grandes actions. Sans doute parce que la communauté est aussi fragmentée et qu’il y a un besoin de cohésion. La participation des personnes c’est politique !

Anne-Claire Devoge