Nous visitons un « collège », qui fait partie d’un groupement d’écoles ; qui comprend 1213 élèves du jardin d’enfance à la 9ème année (la classe de 3ème chez nous) ; dont les locaux construits dans les années 1980 se sont dégradés ; en TEIP depuis 2009 avec un projet intitulé « Education pour le multiculturalisme ». Il  est organisé avec des conseils pédagogiques pour organiser les enseignements et un service de soutien spécialisé aux jeunes et aux familles (le GAAF). Il y a une section spécialisé d’élèves avec un PIEF = projet individuel d’éducation et formation – l’équivalent de nos SEGPA dont les élèves en France ont eux aussi le même type de projet individualisé.

Ce « collège » est aussi sur toute la ville de Lisbonne école de référence pour les élèves aveugles et malvoyants. Ceux-ci sont 12 au 1er cycle et 10 au 2nd, accompagnés par une enseignante spécialisée. Tous les élèves à besoins éducatifs particuliers sont inclus depuis toujours dans les classes ordinaires et les enseignants spécialisés   qui les y accompagnent les élèves fonctionnent comme des personnes ressources pour leurs collègues ordinaires, ils. Il n’y a pas d’école spéciale, c’est à l’école de s’adapter.

Dès le début des années 1970, l’école inclusive est en marche. La « loi fondamentale sur la réadaptation et l’intégration des personnes handicapées » du 8 décembre 1971 établit les bases relatives à la réadaptation et à l’intégration sociale des personnes handicapées. Dans l’école ordinaire, l’intervention commence de manière officielle, d’abord avec les enseignants itinérants, puis avec la création des Équipes d’éducation spéciale (1976), qui ont pour objectif d’intégrer les handicapés dans les classes ordinaires.

Une nouvelle loi est publiée en 1989 et un décret de 1991 règlemente l’intégration des enfants handicapés dans le système éducatif normal. Le modèle pédagogique, le concept de besoins éducatifs spéciaux et la responsabilisation croissante de l’école ordinaire à l’égard de l’éducation des enfants ayant des besoins éducatifs spéciaux sont renforcés.

Le Portugal, comme l’Italie, a une longueur d’avance par rapport à la France sur le concept d’école inclusive. En France il a fallu attendre 15 ans pour que la « loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées » soit votée, pour que la société française pense la participation des personnes handicapées à l’école, puis dans le monde de la formation et du travail ainsi que dans la société tout entière.

Cette école des cycles 2 & 3 accueille beaucoup d’enfants d’origine étrangère, avec une grande diversité culturelle et linguistique, issus de famille dans la grande précarité, dont certaines avec 1 ou parfois plusieurs membres en prison. Les élèves ont de grandes difficultés en expression orale et écrite et des comportements difficiles, qui génèrent un manque d’implication dans les apprentissages, des « doublements » = redoublements, de l’absentéisme et de l’échec scolaire.

L’école tente de les accompagner tous en développant un soutien aux familles, des remises de récompenses et de diplômes valorisées, un renforcement pédagogique important (soutien en portugais et en maths, groupes de besoins…), Elle organise une valorisation des travaux des élèves, des évènements sportifs, une grande fête multiculturelle comme point d’orgue en fin d’année. Une ambition forte pour les élèves fait qu’ils réussissent – exemple de l’apprentissage d’un instrument de musique et de la production de concerts par l’orchestre des élèves.

La directrice adjointe, qui garde une classe en cours d’anglais, nous expose les atouts et les faiblesses de cette équipe d’enseignants qui font preuve d’une grande disponibilité pour aider les élèves et qui collaborent bien entre eux. Il reste à améliorer la collaboration avec la communauté et la formation des personnels « fonctionnaires » = non-enseignants. Les adultes sont nombreux dans cette école, qu’on pourrait qualifier « d’assistants d’éducation », qui surveillent, encadrent, proposent des activités aux jeunes.

Malgré ces freins et avec ces leviers bien identifiés, on sent que c’est une école qui fonctionne bien, dans le respect mutuel grâce aussi, peut-être, à une équipe de direction qui « tient la route ». En éducation prioritaire, tous les échelons sont importants et on gagnera la bataille de ces territoires si on travaille en « multiscalaire » (Lussault) ou en « intermétiers » (Picard) à faire des ponts entre enseignement, formation, recherche, éducation, pilotage, dans et hors l’Ecole.

Isabelle Lardon