Casa di Fico

Il est 6 heures 42. À côté de moi, il y a le petit journal de l’école « Cittadella ». Mais pourquoi Citadella ? On aurait dû leur demander.

Ce que je retiens de la journée d’hier…

L’absence d’une vraie école maternelle en Italie.

L’école est obligatoire à cinq ans.

La structure qui accueille les enfants de 0 à 3 ans s’appelle « asilo nido », ensuite il y a la « scuola dell’infanzia » qui serait l‘équivalent de la maternelle mais n’étant pas obligatoire, elle n’est pas accessible à tous. Elle est la plupart du temps payante et elle peut être communale ou totalement privée.

Les écoles élémentaires peuvent être publiques, communales (et dans ce cas même les enseignant.es sont payé.es par la commune) ou privées.

Il y a de grandes inégalités entre le nord et le sud de l’Italie.

Ileana, l’enseignante que nous avons rencontrée le matin nous a expliqué que si elle était restée dans sa Calabre natale, elle n’aurait pas pû se former.

La formation continue des enseignants n’est pas prise en charge par l’état, elle dépend du budget et de la volonté des communes. Apparemment, la ville de Modène donne pas mal de moyens au secteur éducatif.

Pour compenser le fait qu’il n’y ait pas de véritable école maternelle accessible à tous, des associations soutenues parfois par la commune, ouvrent différentes structures d’accueil, notamment dans les quartiers défavorisés comme celui où nous étions hier. La ludothèque en fait partie. C’est un lieu de socialisation pour les enfants mais aussi pour leurs parents.

Plusieurs fois, il a été question des parents pendant nos échanges d’hier. Pour toutes les professionnelles que nous avons rencontrées, il est très important que les « mamans » (c’est le mot qu’elles ont employé) se sentent accueillies et qu’elles créent des liens entre elles. Qu’elles ne soient pas isolées. C’est d’autant plus important qu’il s’agit de personnes d’origine étrangère, qui ne parlent pas très bien l’italien, qui sont souvent intimidées, qui ont « honte », qui n’ose pas prendre leur place.

La ludothèque permet d’accueillir les enfants de 0 à 5 ans avec un de leurs parents (ou un autre adulte) et les enfants de l’école primaire adulte, sur inscription. Ils sont encadrés par des éducatrices diplômées en sciences de l’éducation.

Et les différentes structures d’accueil des enfants sont gérés par une coordinatrice, une « pédagogiste », elle aussi formée et diplômée en sciences de l’éducation.

L’importance de la formation est souvent revenue dans nos conversations.

À l’école primaire, pour les enfants en situation de handicap, il existe des enseignants de soutien. Ce sont des enseignants spécialisés qui interviennent dans les classes pour aider leurs collègues à accueillir au mieux les élèves porteurs de handicap.

À l’école, il a été question de pédagogie de projets et d’accueil de tous les enfants quelque soit leur origine. Les enfants en difficultés arrivent à trouver leur place parce qu’ils se sentent accueillis, parce que les élèves s’entraident et que personne n’est laissé sur le côté.

À aucun moment, il n’a été question des « résultats » des élèves, de la réussite scolaire. Apparemment, ce n’est pas la préoccupation première des enseignantes (ce qui ne signifie certainement pas que ce n’est pas important pour elles). Ce qui semble prévaloir c’est que chacun trouve sa place, que tous les élèves forment un groupe.

J’ai senti une attention particulière à chaque individu et en même temps une grande importance donnée au collectif, notamment à travers les projets.

Iléana, la maestra (et directrice adjointe) n’appartient pas à un mouvement pédagogique. Elle a trouvé très intéressant tout ce que nous avons dit sur les pédagogies nouvelles. Sa pratique se rapproche beaucoup de ce que nous faisons à l’ICEM, par exemple, mais elle ne se base pas vraiment sur une théorie. C’est par la force des choses qu’elle en est arrivée à mettre en place des projets, de l’entraide entre les élèves, de la coopération. Elle l’a fait parce qu’elle s’est dit que c’était une solution pour permettre à chacun de se sentir bien à l’école et par conséquent d’entrer dans les aprentissages.

J’ai discuté un peu avec des élèves qui faisaient une bande-dessinée et avec un petit garçon qui m’a expliqué qu’il avait un parent français qui s’appelait Pascal…

Je suis repartie avec une pile de petits journaux de l’école et avec l’envie de revenir et de découvrir de façon plus approfondie le fonctionnement de l’école et celui de la ludothèque.

D’ailleurs, Anna qui, en partant nous a offert des petites cartes poétiques, aimerait bien, elle aussi, venir découvrir l’école de Villeneuve d’Allier, en Haute-Loire…

Sylvie Choisnet